Transport & Logistique

Le Maroc a de quoi devenir une plateforme logistique pour le Maghreb et l’Afrique.

Public et privé œuvrent pour rattraper le retard en matière de logistique. Le foncier constitue le principal frein au développement des activités logistiques.

Quel bilan pouvez-vous faire de l’état actuel des secteurs de la logistique et des transports ?

Mohamed Talal : Pour le secteur de la logistique, il est à noter que suite à l’étude de la Banque Mondiale en 2006, il est apparu que les coûts de la logistique représentait 20% du PIB marocain, alors que pour les pays de l’UE ce taux variait entre 10% et 15% du PIB.La même étude classait le Maroc à la 94e place pour l’indice de la performance logistique derrière des pays comme Bahreïn (36e), ou encore la Tunisie (60e) ! Cette contre-performance vient amputer la compétitivité des entreprises marocaines ! Pour pallier ces déficiences, le ministère de l’équipement et du transport et la CGEM ont travaillé ensemble depuis 2007 accompagnés par un cabinet de renom, ce qui a donné lieu à l’élaboration d’un «Contrat Programme Logistique» régissant les grands axes d’orientation qui nous amèneront à améliorer notre compétitivité logistique pour la ramener à 15% du PIB à l’horizon 2015, ainsi que d’autres indicateurs tout aussi importants telles que les émissions de CO2. Ce contrat programme a été signé par le gouvernement et la CGEM en avril dernier, et apporte enfin des solutions, entre autres celle liée à la problématique du foncier, en logistique. Actuellement sont en cours de rédaction les différents contrats d’application, en collaboration avec les parties concernées : MET, CGEM, Fédérations, Administrations publiques ; découlant dudit contrat programme avec l’échéance à mi-2011 pour leur déploiement. Il est à noter que le contrat programme logistique inclus «un contrat d’application Transport» qui est actuellement fin près pour signature, et ce, grâce à un travail important entre la direction du transport du MET et la Fédération Nationale du Transport (FNT) accompagné par d’autres associations professionnelles du secteur. Le nouveau code de la route, qui est entré en vigueur le 1er octobre dernier, a également permis de structurer le secteur en corrigeant sensiblement les distorsions entre les secteurs formel et informel, amenant ces filières informelles à rejoindre les entreprises structurées, avec les conséquences positives que cela peut avoir sur la sécurité des citoyens !

Le pays répond-t-il aux standards internationaux ?

Qu’appelez-vous standards internationaux ? Si vous parlez de logistique il y a lieu de rendre la nôtre plus compétitive pour offrir à nos entreprises une meilleure compétitivité à l’export, mais également à l’import et ce ne serait que par la réduction des délais ! Les entreprises logistique doivent par contre répondre à un souci de traçabilité exigées par les entreprises exportatrices, car imposées par les pays importateurs ! Pour cela les logisticiens marocains doivent investir en systèmes d’informations, et là le Maroc n’a pas à rougir car il existe aujourd’hui sur la place des entreprises de renom internationale mais aussi marocaines utilisant les dernières technologies en la matière comme le  WMS et la radiofréquence, par exemple.

Quels sont les freins à son véritable élan ?

Les freins au véritable élan de la logistique sont en premier lieu la problématique du foncier. Si le contrat programme est censé apporter un foncier public, il reste cependant à le mobiliser, ainsi que de terminer les travaux en cours entre les différentes administrations publiques, la FNT et les autres fédérations et associations, en vue de la dématérialisation et la simplification des process. La catégorisation mise en place par la douane en est un exemple probant. Ces efforts permettront une réduction conséquente des coûts et surtout la réduction des délais d’import et d’export.

Selon vous que faudrait-il faire afin de pallier ces carences ?

Le chemin reste parsemé d’embûches. Cependant depuis avril 2010, cette voie a le mérite d’exister et nous permettra d’avancer tout en apportant les corrections nécessaires au fur et à mesure de son déploiement à travers les différents contrats d’application. Ce que nous devrons faire, c’est surtout fédérer tous les acteurs de la chaîne logistique, pour qu’ils apportent leurs expertises au service de l’amélioration de la compétitivité de notre pays qui est entré dans l’ère de la mondialisation par la grande porte. Citons simplement les accords de libre échange, statut avancé avec l’UE…

Transport de personnel ou de marchandises, gestion du parc automobile, fret, messagerie rapide, stockage…, le pays possède t-il un fort potentiel ?

Le pays possède bien entendu un fort potentiel. Mais je dirais que les opérateurs d’aujourd’hui regardent par-dessus l’épaule du Maroc, en lorgnant des marchés tels que le Maghreb et l’Afrique, des marchés qui donneront aux entreprises marocaines cette économie d’échelle nécessaire pour atteindre la taille critique recherchée. Le Maroc tout entier sera demain une plateforme logistique régionale pour l’Afrique et le Maghreb. La volonté de notre pays dans ce sens est illustré par le Méga projet de Tanger Med, et concrétisé par des clients tels que Renault qui s’implante à Melloussa et qui compte exporter une majeure partie de sa production au Maghreb. La logistique viendra donc emboiter le pas à des secteurs tels que la finance, le BTP, qui eux sont déjà en Afrique !

La clientèle potentielle répond-t-elle favorablement aux offres en la matière ou se montrent-t-elle hésitante ?

Les multinationales se tournent instinctivement vers les prestations logistiques et en font un levier de gain de compétitivité, de flexibilité et de réactivité face à des marchés fluctuants, et un environnement où le long terme se limite à 1 an! Les entreprises marocaines sont plus réticentes, mais la dure loi de la concurrence (nationale et étrangère), les amènera à plus de maîtrise de leurs coûts, de recherche d’indépendance vis-à-vis des fluctuations des marches, et de réactivité face à des besoins des consommateurs de plus en plus infidèles du fait d’une offre pléthorique ; mondialisation oblige !

Les autorités de tutelle et les différentes associations travaillent-elles de concert pour améliorer la situation globale ?

Bien entendu, comme je l’ai déjà expliqué plus haut. Ce partenariat Public-privé est une condition sine-qua none, si nous voulons réussir cette entrée dans la mondialisation, et devenir un pays «opérateur logistique» pour l’Afrique, et rendre notre industrie compétitive ; face à des pays notamment européens plus compétitifs que nous aujourd’hui (grâce à une logistique performante) et surtout à la crise économique européenne qui les rend plus agressifs envers des pays émergents tel que le nôtre, où d’autres pays émergents cibles des exportateurs nationaux.

Comment-voyez-vous l’avenir de ces deux secteurs ? Quels sont les créneaux porteurs ?

Les différents plans sectoriels comme Logistique, Rawaj, Emergence, Maroc Vert, accompagnés depuis 10 ans par d’importants investissements en infrastructures, autoroutes, routes, ponts, ainsi que l’ouverture à la concurrence de secteurs clés comme par exemple Marsa Maroc, Somaport,… pour les ports, voire le ciel avec l’Open Sky, montrent indéniablement l’engagement du pays dans sa volonté d’ouverture et de performance industrielles. Plusieurs sont encore ouverts et d’autres viendront en fonction notamment de l’évolution de l’économie mondiale. Par conséquent, les secteurs de la logistique et du transport au Maroc ne pourront que se mettre au diapason des exigences des marchés et nous verrons dans les années à venir, l’émergence d’opérateurs nationaux performants, mais aussi l’arrivée de plus en plus nombreux d’opérateurs étrangers ; la crise mondiale accélérant le pas.

L’écologie est une notion cruciale. Transport et logistique vont-ils intégrer cette valeur dans leur développement ?

Cette valeur est très largement incluse dans le contrat programme puisque l’objectif de ce dernier, est de réduire de 35% les émissions de CO2 à l’horizon 2015, mais surtout nous parlerons d’empreinte carbone. Cette performance est rendue possible grâce à plusieurs actions, notamment la massification des flux par le biais de plateformes logistiques qui permettront de grouper les marchandises et les transporter sur des ensembles routiers type semi-remorques au lieu de petits camions, ce qui réduira considérablement les émissions de CO2 par tonne transportée. Il y a aussi les primes à la casse initiée pour rajeunir le parc, et par là avoir des véhicules avec des moteurs de dernière génération avec injections électroniques et donc des consommations aux 100 kms de 30% inférieures. Par ailleurs, le développement des infrastructures routières et autoroutières apporteront des réductions conséquentes de consommation, et par conséquent une empreinte carbone moindre.

27/01/2011

La Vie eco

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