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Transport et Logistique au Maroc : Fortes perturbations dans le ciel en 2012

L’Open-Sky a finalement débouché sur des situations de crises généralisées. Compagnies low-cost ou régulières ne sont pas épargnées. Le segment fret demeure trop onéreux.

Plus de six ans après l’entrée en vigueur de l’Open-Sky (2006), les cieux n’ont de cesse de s’obscurcir. Si cette libéralisation a eu pour corollaire la «démocratisation du ciel», force est de constater que l’euphorie des débuts a laissé place à de graves inquiétudes, voire des turbulences aux conséquences irrémédiables. Qu’il s’agisse de transport de passagers ou de marchandises, le mode aérien est interconnecté et reflète sans doute le mieux les facettes de la globalisation, marquées actuellement par la crise. Ainsi, selon l’Office national des aéroports,

le trafic aérien commercial a atteint 15 millions de passagers en 2012, soit une  baisse de 3,61% par rapport à 2011. Aussi bien le trafic domestique qu’en provenance d’Europe, qui pèse le plus gros, est en baisse, comme en témoignent les chiffres du mois de décembre : -7,5% pour le premier et -2,25% pour le second. Les autres faisceaux géographiques sont certes en hausse (+5% pour l’Afrique, +6% pour le Moyen et extrême Orient, +3% pour l’Amérique du Nord…), mais leur poids dans le trafic global demeure très faible.

Toujours selon l’ONDA, durant le mois de décembre 2012, il y a eu 11 034 mouvements d’avions, soit une baisse de 2,31% par rapport à la même période de l’année précédente. La part de l’aéroport Mohammed V est de 52,09% de ce trafic, Marrakech Menara de 19,98 % et Agadir Al Massira de 8,37 %. Pour ce qui est du fret aérien, il a enregistré durant le mois passé une baisse de 8,11% par rapport à la même période de l’année précédente, pour finalement atteindre 4 828 tonnes contre 5 254 tonnes en 2011.

A la lecture de ces statistiques, on peut dire que 2012 confirme la poursuite de la mauvaise conjoncture internationale. C’est comme si le pouls de l’activité terrestre se répercutait tout en haut !

Baisse des fréquences de l’ensemble des compagnies aériennes

Pour preuve, la réduction des fréquences de la part de l’ensemble des compagnies aériennes (low-cost et régulières). Ainsi, au printemps dernier, La Vie éco titrait «Aérien : 200 vols annulés par semaine en 2012». L’article signalait avec pertinence que tourisme et trafic aérien étaient intrinsèquement liés. Or, le transport aérien est une activité extrêmement sensible à la conjoncture économique, et les compagnies aériennes, notamment les low-cost sur lesquelles le Maroc a misé pour atteindre les 10 millions de touristes qu’il s’était fixé dans le cadre de la Vision 2010, n’hésitent pas à arrêter des dessertes dès qu’elles sentent souffler des vents contraires. La crise économique chez les marchés émetteurs, les troubles politiques ou les tensions sociales dans les pays de destination, mais également le facteur coût, notamment le prix du carburant, les poussent soit à stopper ou réduire les fréquences sur des destinations devenues non rentables, soit à opter pour des destinations plus courtes, moins coûteuses. Dans l’article en question, il est indiqué que «pour la saison 2011-2012, le Maroc a fait les frais de la conjugaison de ces éléments en subissant une révision à la baisse de la programmation de la destination par de gros opérateurs comme Royal Air Maroc, Ryanair et Easyjet, pour ne citer que ces derniers. Globalement, la baisse des dessertes, aujourd’hui par rapport à l’hiver 2010-2011, est d’environ 20%, selon les calculs faits par le ministère du tourisme. En nombre de vols, cela donne 200 fréquences hebdomadaires qui ont été déprogrammées et cette baisse touche en majorité les vols au départ de l’Europe». Par exemple, Royal Air Maroc avait réduit en un an ses fréquences sur l’Europe de 33%, passant de 379 à 253 vols par semaine, tandis que Ryanair avait réduit la voilure sur le Vieux Continent de 20 %.

De nombreux observateurs font remarquer que le modèle low-cost en général et marocain en particulier n’est pas viable, surtout lorsque le business peut être apparenté à de la prédation commerciale tous azimuts.
A un moment donné, fatalement, il est impossible de continuer à vendre à un prix inférieur au coût de revient. En 2012, la concurrence exacerbée s’est ajoutée aux crises économiques et géopolitiques ; à la hausse du prix du baril ; à la baisse des aides indirectes (que d’aucuns qualifient de subventions déguisées)… Résultat : outre la réduction de la voilure, la suppression de dessertes, on assiste également à une autre facette de la mondialisation. A savoir le diktat des maisons mères. Ainsi, Jet4You qui a investi le ciel marocain dès l’entrée en vigueur de l’Open-Sky a finalement été absorbée voici un an par TUI. Pareillement, le mastodonte Lufthansa a enclenché un vaste plan de restructuration à l’international. Son bureau de vente sis avenue des FAR à Casablanca a baissé ses rideaux le 30 novembre 2012, à la grande stupeur des salariés. La compagnie allemande qui a suspendu ses vols hivernaux prévoit néanmoins de réouvrir sa ligne casablancaise le 22 mars prochain. Mais peut-être le fera-t-elle via un autre mode opératoire (actuellement en vigueur) : les «Team Mailbox». Tunisair vient de lancer un vaste plan de restructuration.

Un parc cargo sous-dimensionné

Le Royaume est-il dans le collimateur ? Depuis plus d’une décennie, on assiste à une valse d’arrivées, de départs, de transformations. Seule certitude, à l’instar de leur économie saine, les compagnies asiatiques semblent tirer leur épingle du jeu. Quant aux autres, elles cherchent par tous les moyens à réaliser des économies…au détriment de la qualité de service et en sacrifiant les ressources humaines sur l’autel du profit. A l’instar du transport de touristes, celui des marchandises pâtit également de la mauvaise conjoncture.

Ainsi, l’activité cargo affiche une baisse avoisinant les 20%. Mais outre les aléas macroéconomiques, le fret national souffre aussi de faiblesses microéconomiques et structurelles. C’est ce qui ressort d’un benchmarking commandé par l’ONDA, où il apparaît clairement que le coût du fret aérien au Royaume reste beaucoup plus élevé que sous d’autres cieux. Ainsi, il varie de 19 à 20 DH le kilo, depuis ou vers l’Europe centrale, alors que des vols cargo d’une distance similaire en Europe sont facturés 14 à 17 DH le kilo. Dans le même esprit, ce coût est de 29 DH le kilo depuis ou vers New-York contre 19 DH, si le vol est opéré depuis l’Espagne ! Dans son plan stratégique, l’ONDA prévoit de multiplier par 2,5 la capacité des gares fret en 4 ans. Pour ce faire, l’office accompagne la politique logistique du pays en s’introduisant dans la chaîne par le biais de ses sept aéroports nationaux disposant d’une gare fret. Pour ces derniers, l’ONDA veut porter, d’ici 2016, la capacité des gares à 160 000 tonnes. Plusieurs projets de rénovation et de réaménagement sont en cours. Toutefois, les observateurs avertis soulignent que le principal frein au fret aérien local est la faiblesse du parc cargo. En effet, l’essentiel du transport de marchandises (78%) a lieu sur les vols passagers ! Ce qui n’est pas sans désagrément (retards, dégâts bagagerie…). Seulement 22% sont transportés sur des vols purement cargo. Le ciel marocain est donc à l’image de la conjoncture économique mondiale. La période n’est plus à l’euphorie. Malgré les plans de restructuration à répétition, la plupart des compagnies manque de visibilité. 2013 est annonciatrice de nombreuses turbulences.

L’aviation d’affaires, une niche qui émerge

L’adage qui dit que le temps c’est de l’argent correspond tout à fait au créneau porteur de l’aviation d’affaires. Qu’il s’agisse de businessmen pressés, de PDG, d’investisseurs, de grands commis de l’Etat, de diplomates, de stars…, ils sont sans cesse plus nombreux à recourir à ce type de transport. Certes, quelques heureux élus possèdent leur propre jet privé. Mais louer un appareil s’avère moins onéreux. En effet, la société Anfajet nous indique qu’il faut compter un investissement de 42 millions de DH pour un appareil CJ1, avec 2 millions de DH en sus pour le matériel idoine. Alors que la même compagnie pratique des tarifs avoisinant 30 000 DH l’heure de vol pour un jet de 5 places. Ce qui revient à 6 000 DH par passager (un parcours Casablanca-Madrid, par exemple). Pour avoir une autre idée tarifaire, Alfa Air propose des vols de 20, 30, 40 ou 50 minutes pour un prix modique dans ses avions sur des trajets à vide à date figée. Par exemple, un vol reliant Marrakech à Zagora (40 mn) vous reviendra à 1 500 DH, alors que le trajet Benslimane-Marrakech (50 mn) vous sera facturé 3 000DH, contre 1000 DH pour Benslimane-Rabat (20 mn) ou encore 2 000 DH pour Fès-Benslimane (30 mn).

La flotte ? Des Jet stream 32, Falcon 10 et Piper Seneca II. Si l’essentiel de la clientèle est constitué d’hommes d’affaires, Taieb Belghiti de Anfajet dit vouloir développer les segments touristiques, cargo et évacuation sanitaire. Selon lui, les vols dont la durée est inférieure à 2 heures sont les plus réclamés. Ce business est-il rentable ? « La société Anfajet a fait le choix de l’excellence depuis le début de son activité (avions neufs, pilotes avec plus de 4 000 heures de vol, maintenance chez le constructeur, hangar…) ; ce choix a un coût qui, malheureusement, place Anfajet dans la fourchette supérieure au niveau des prix sans pour autant que le client ne perçoive cette différence. En effet, la sécurité est la chose la plus importante dans l’aviation et en même temps cette donnée est difficilement quantifiable par le client. Nous sommes persuadés que la sécurité n’a pas de prix et que c’est cela qui fera la différence avec le temps», affirme Taieb Belghiti. Interrogé sur la visibilité sectorielle de cette année, ce dernier conclut que «le marché de l’aviation privée est embryonnaire au Maroc. Nous sommes dans une phase de vulgarisation qui durera encore 2 à 3 ans. Pour Anfajet, 2013 sera une année d’investissement avec l’acquisition d’un nouveau jet de 9 places».

Source : La Vie éco

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