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Droits de douane sur les voitures : faut-il s’attendre à des baisses de prix ?

Depuis mars, les droits de douane sur les voitures neuves d’origine européenne sont en moyenne de 2,05% au lieu de 6% auparavant La baisse représente une économie de 187 millions de DH pour les concessionnaires et importateurs.

Y aura-t-il une baisse des prix de voitures ? Depuis la baisse au mois de mars des droits de douane sur les véhicules neufs importés de l’Union européenne, beaucoup de candidats à l’achat d’une voiture se posent en tout cas la question. Et qui mieux que les concessionnaires pour y répondre. Mais avant de le faire, il est intéressant de voir déjà combien représenterait potentiellement cette baisse. Pout cela, il faut d’abord rappeler que la baisse des droits de douane du mois de mars entre dans le cadre du processus de démantèlement prévu par l’accord de libre-échange entre le Maroc et l’Union européenne. Ils passeront, en moyenne, de 6% à 2,05% et à 0% à partir de mars 2012 (voir tableau). Si on prend l’exemple d’une voiture dont la valeur est de 100 000 DH, l’importateur devra débourser 2 050 DH au lieu de 6 000 DH pour les frais de dédouanement, sans compter la TVA sur l’importation. Il aura donc réalisé une économie de 3 950 DH par unité. Si l’on sait qu’en 2010, 47 281 unités ont été introduites depuis l’Union européenne, selon les chiffres de l’Office des changes, on comprend l’enjeu de ce réaménagement tarifaire pour les concessionnaires de véhicules. Si on estime à 200 000 DH la valeur unitaire moyenne de ces voitures, les professionnels de l’automobile bénéficieront ainsi d’une économie de 187 millions de DH. Ce qui n’est pas négligeable.

Reste à savoir maintenant si tous les opérateurs vont répercuter cette baisse, totalement ou en partie, sur leurs prix de vente.

Mais déjà, au sein de la communauté des concessionnaires, les avis divergent quant à l’impact réel de la baisse du niveau des droits de douane sur le coût de revient final du produit. Certains en minimisent même l’effet pour des facteurs plus ou moins objectifs. «La baisse n’est pas aussi importante qu’on le croit», estime Amal Guedira, DG d’Auto Nejma qui commercialise, entre autres, les marques Mercedes, Jeep et Chrysler. Et de poursuivre qu’elle «reste faible puisqu’elle est de 2 à 3% selon les cylindrées, d’autant que les fluctuations à la hausse de l’euro par rapport à la monnaie nationale qui étaient de 1 à 2% font que son incidence sur le coût de revient est moins décisive qu’on le croit». Aussi M. Guedira estime-t-il la baisse réelle à 1 ou 2% en prenant en considération les fluctuations enregistrées récemment dans le taux de change.

L’impact sera visible à partir de mai

Un autre facteur atténue l’impact de la réduction des droits de douane, ne serait-ce que temporairement. Comme l’avancent du moins les patrons de certaines entreprises importatrices de voitures neuves. Il s’agit des stocks de voitures importées avant l’entrée en vigueur des nouveaux droits de douane. La majorité des concessionnaires en dispose. Leurs volumes varient en fonction des capacités et de la taille des opérateurs. Mais généralement, ils vont de un à trois mois de ventes. Du coup, les professionnels fixent les prix en fonction de la totalité des produits disponibles. «Ce qui donne des tarifs sur lesquels l’impact de la baisse des droits n’est pas visible tout de suite», explique Adil Bennani, DG de Toyota Maroc. Le concessionnaire de la marque japonaise qui écoule sur le marché marocain quelque 5 000 unités par an, s’approvisionne également (en partie) à partir d’unités de production de Toyota installées dans l’Union européenne. Et ces importations s’acquittent donc du même taux de droit de douane appliqué aux marques européennes.

Ce n’est donc qu’une fois les anciens stocks écoulés que l’effet de la baisse des droits de douane sera réellement visible. Par conséquent, si répercussion il y a, elle ne pourra vraisemblablement se produire qu’à partir du mois de mai ou juin. Et ce n’est pas un hasard si cela coïncide avec l’organisation du salon de l’automobile où la plupart des opérateurs saisissent l’occasion pour annoncer des offres alléchantes.
Mais une fois ces effets éliminés, notamment celui des stocks et celui du change, les concessionnaires répercuteront-ils ou non la baisse sur leur clientèle finale ? Pas si sûr. Certains seront tentés de profiter de cette économie sur les droits de douane pour renforcer leur marge bénéficiaire.

Mais, à en croire les professionnels contactés par La Vie éco, ils ne sont pas nombreux à opter pour cette stratégie. «La concurrence que se livrent les opérateurs sur ce marché est rude au point que ces derniers saisissent toutes les opportunités pour offrir des prix attractifs», explique un spécialiste. C’est pourquoi la plupart des opérateurs n’hésiteront pas à partager le fruit de cette baisse avec leurs clients. Comme le confirment les responsables d’Auto Nejma, «toute baisse des droits de douane sera systématiquement répercutée sur nos prix». Même attitude auprès du numéro un du marché marocain, en l’occurrence Renault qui réalise près de 34% des ventes totales (en unités et en intégrant le bilan de marque Dacia aussi). «Nous avons fait le choix de redistribuer totalement cet avantage financier à nos clients», affirme Jean Frédéric Piotin, DG de la représentation du groupe au Maroc. Mais dans les faits, comment procéderont-ils ? Vont-ils baisser les prix de vente publics ? Ou alors auront-ils recours à des promotions ? En fait, rares sont les concessionnaires qui envisagent de baisser les prix. Car, en général, les professionnels de l’automobile rechignent à concéder des baisses directes. «Les concessionnaires se gardent souvent de recourir à une concurrence par le biais de baisses des prix affichés publiquement pour éviter une dégringolade des prix qui serait fatale à tout le monde», confie le responsable d’une grande entreprise du secteur.

Pour séduire les clients sans fâcher les concurrents ou confrères, les professionnels font appel à d’autres formules. D’abord, on accorde des promotions comme les fameuses remises qui se sont multipliées ces derniers temps sur le marché de l’automobile. Celles-ci peuvent aller de 10 000 DH pour les voitures de gamme moyenne à 50 000 DH pour les berlines et les 4×4. Ce sont en fait des baisses mais limitées dans le temps.

En fait, la concurrence ne se limite pas aux prix de vente. Loin de là. Les services rendus à la clientèle se sont révélés ces derniers temps un argument de taille pour conquérir des parts de marché. C’est pourquoi la bataille devient très rude sur ce segment pour lequel sera réservée une partie importante des fonds économisés par la baisse des droits de douane. La plupart des concessionnaires saisissent ainsi l’occasion pour prolonger la durée des garanties. Certains n’offrent plus seulement la garantie classique d’un an, mais plutôt de 3 ans voire de cinq ans. Cela a un coût supplémentaire pour les professionnels mais aussi un avantage précieux. «Les clients sont obligés de souscrire aux services après-vente du concessionnaire pour pouvoir bénéficier de la garantie, ce qui permet de doper l’activité de ses ateliers techniques et de sa filière de pièces de rechange», explique le directeur commercial d’une grande marque de la place.

Des formules de financement intéressantes

Autre argument de vente, non moins important, dans lequel les opérateurs chercheront à investir davantage : le financement. Des concessionnaires miseront ainsi sur le renforcement des offres facilitant aux clients l’accès aux crédits. «Une partie de l’argent économisé servira à négocier avec les banques et les organismes de crédit à la consommation des formules pour le financement de l’achat de nos véhicules», confie le directeur marketing au sein d’une société du secteur. Cela se répercutera par des crédits gratuits ou à des taux d’intérêts intéressants. Bien entendu, le distributeur supporte le coût de cet effort consenti aux clients.
En parallèle, les concessionnaires consacrent une partie considérable des fonds au renforcement des campagnes de communication à travers différents canaux : publicité, relations publiques, marketing… «C’est un outil décisif dans notre secteur», précise un professionnel.
Résultat des courses : les clients ne doivent pas s’attendre à des baisses spectaculaires des prix de vente publics mais pourront toujours négocier des remises plus consistantes ou attendre aussi des promotions que les concessionnaires promettent soient intéressantes. C’est que de l’autre côté, il y a aussi les actionnaires et les maisons mères qui demandent eux aussi leur part du gâteau. «Les fournisseurs sont très attentifs à l’évolution des marchés de leurs distributeurs», explique M. Bennani de Toyota Maroc. Du coup, lorsque le secteur assiste à un changement conjoncturel favorable, ils n’hésitent pas à se manifester pour «demander l’amélioration de leur marge».

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